Monsieur le président,
quelle est la situation énergétique actuelle en Afrique
centrale ?
Il y a un besoin énorme. Le
taux d’électrification en Afrique
centrale est l’un des plus bas
au monde. En moyenne 13%. Et
dans la zone, le Cameroun se
porte le mieux. La région de
l’Extrême-nord est seule au
niveau de 13%. Dans le Nord,
c’est 17-18%, l’Adamaoua 33%,
l’Est autour de 18%. Les villes
de Yaoundé et Douala sont
les mieux loties, avec un taux
d’électrification de 90 %. Dans
ces grandes métropoles, il n’y
a personne sans électricité,
même si tout le monde ne
paie pas. Pour revenir au
Etats membres du Pool énergétique pour l’Afrique centrale
(PEAC), la puissance installée
est d’environ 7 200 MW. On a
besoin de beaucoup plus. Car
la consommation par habitant
en Afrique centrale est autour
de 109 KW par an. C’est 10 fois
plus en Afrique du Sud. Si on
veut arriver à leur niveau, on
doit multiplier par 10 la puissance installée.
Est-ce la mission du Pool
énergétique de l’Afrique
centrale ?
Ce pool a pour objectifs de
mettre en réseau et mutualiser
toutes nos ressources énergétiques pour pouvoir partager
l’énergie. Sur un plan technique,
c’est quelque chose qui fait
sens. C’est ainsi que l’Europe
fonctionne. Par exemple à 18
h, la France envoie l’électricité en Italie et à 20 h, l’Italie
vend de l’électricité en France.
Nous, en Afrique centrale, on
fonctionne d’une manière très
isolée. Dès que le Cameroun
mettra Nachtigal en route, il
aura 450 MW d’énergie supplémentaire. Qu’est-ce qu’il
en fera ? C’est beaucoup. Soit
le consommateur paiera plus
cher pour soutenir l’investissement, soit le citoyen ne paiera
par les impôts. Or, s’il y avait
une connexion avec les voisins,
on pourrait amortir le choc et
réguler ce flux d’une manière
plus facile et rentable pour
le pays.
A propos des infrastructures communes, que
retenir au terme de la
réunion extraordinaire du
PEAC tenue lundi dernier à
Yaoundé ?
Il y a un certain nombre de
projets communs retenus
dont les études sont bouclées.
Maintenant, on a commencé à
parler aux bailleurs de fonds.
Le travail qui va suivre sera
d’engager ces bailleurs de
fonds pour faire avancer ces
projets. Certains ont marqué
leurs accords de principe et
maintenant, il faudrait qu’on
commence à travailler avec eux
pour arriver à la signature des
financements. Voilà en ce qui
concerne les grands projets
de connexion transfrontalière.
Mais parmi nos projets, il y
a des projets d’alimentation
des pays aux frontières et
qui ne dépendent pas tellement des bailleurs de fonds.
Ce sont des investissements
que les sociétés d’électricité
peuvent faire. Par exemple,
au Sud du Cameroun, il y a
la ville de Kyé-Ossi qui n’est
pas alimentée en énergie alors
qu’en face, en Guinée-équatoriale, il y a de l’électricité. On
pourrait trouver un accord de
partage simple dans ce cas.
Les infrastructures communes
sont importantes à plus d’un
titre. Par exemple, quand on
prend le barrage de Chollet
entre le Cameroun et le Congo
où les saisons de pluie sont
inversées, celui-ci peut tourner
à plein régime toute l’année.
En ce sens que, pendant que
le Cameroun est en étiage, le
Congo fait tourner le barrage
et inversement. On pourrait
donc jouer sur ce mécanisme
d’échange bénéfique à tous.
Compte tenu du potentiel
hydraulique du Cameroun,
comment comprendre que
la production énergétique
ne suive pas ?
Le Cameroun est deuxième
après la RDC. Et c’est vrai que
notre potentiel hydraulique est
d’à peu près 20 GW et dans la
mini-hydraulique, on a environ
2 GW. C’est dire qu’on peut
produire à peu près 22 000
MW. Si on prend les 1500 MW,
c’est dire qu’on peut multiplier
notre puissance installée par
15. Pourquoi ce n’est pas le cas
? Le problème c’est premièrement les infrastructures qui
sont lourdes à construire. La
deuxième chose, c’est l’équilibre offre et demande. Il faut
bien comprendre que si vous
construisez une infrastructure
et que vous n’avez pas de client,
quelqu’un devra néanmoins
payer. Les industriels nous disent
: construisez les centrales et
on va venir nous installer. Mais
ce n’est jamais garanti. D’où
la nécessité des coopérations
avec la région pour vendre à
l&rsqu...
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